Dialogue algérien-Algérie


Une ville d’Algérie. Un immense bureau décoré de manière tape-à-l'œil. 
On frappe à la porte.

- Entrez.
- Bonjour.
- Salut ! Vous désirez ?
- La véritable réponse prendrait trop de lignes et on a juste le temps d’une chronique. Donc j’ai une question.
- Dis toujours.
- Toujours ?
- Dis.
- Ok. Vous êtes le pouvoir en Algérie. Pourquoi vous ne faites rien pour les algériens ?
- Tu rigoles man ? On a tout ce qu’on veut, de l’argent à ne plus savoir qu’en faire, des villas un peu partout, on voyage dans le monde entier, nos enfants étudient dans les meilleures écoles, on…
- Non, pas ceux-là. Les vrais algériens.
- Ah, fallait préciser. Mais au lieu de nous demander ce qu’on peut pour vous, vous devriez plutôt vous demander ce que vous pouvez faire pour nous.
- Ah bon ?
- Oui. D’abord, laissez-nous un peu tranquille. Même les lycéens nous en veulent. Pourquoi ils se plaignent ? Etre lycéen ça dure pas toute la vie, à quoi ça sert de revendiquer ?
- Ils auront toujours des revendications quand ils seront étudiants.
- Ki yzid nsemmouh Bouzid.
- Et d’autres lycéens les remplaceront.
- Et nous on remplacera Benbouzid. Et ceux qui se plaignent du prix de la semoule et des autres cochonneries que vous mangez ? Le prix du pétrole augmente, donc le prix de la nourriture doit augmenter.
- Vous avez une logique étrange…
- Non, c’est de la logique purement exponentielle. Et puis, le jeûne ! Rien de tel que le jeûne dans ce genre de situation !
- Vous devriez dire ça à votre veste qui est sur le point de craquer.
- C’est un coup bas. 
- Si vous le dites. Et le terrorisme ? Il est vaincu ou pas ?
- Tout dépend qui le demande.
- C’est moi.
- Boutef a vaincu le terrorisme. Mais il doit continuer son travail pour le vaincre bien comme il faut. Alors vote pour lui en 2009.
- Et les bombes qui explosent ?
- Considère ça comme des feux d’artifices.
- Et les gens qui meurent ?
- Aucun algérien n’est mort.
- Pas ceux-là, les autres.
- Ah oui c’est vrai… Ça devient une obsession. Ecoute, vous vous plaigniez du manque de logements, non ? Faut savoir ce que vous voulez.
- Alors le but n’est pas de construire un million de logements, mais plutôt d’exterminer un million d’algériens ?
- Voilà. Mais avoue que ça fait pas très marketing de dire ça.
- La mort se vend mal...
- On voit que tu connais pas le monde des affaires. Ecoute man, on n’a pas envie de s’occuper du peuple. En tout cas, pas comme tu l’entends. On a les gros contrats, les relations internationales et les élections, donc c’est bien suffisant. Le reste est pas intéressant, on laisse pourrir.
- Pourri, c’est bien le mot.
- Merci.
- Ce n’était pas un compliment.
- Quoi ?
- En tout cas, nous, on va finir par s’énerver.
- Ah, je sens bien la main de l’étranger derrière tout ça. Pour qui tu travailles ?
- Pour l’honneur.
- File-moi son numéro.
- Il n’a pas le téléphone.
- Alors c’est un gueux.
- Sûrement. L’honneur et l’argent sont souvent incompatibles dans notre pays.
- Si c’est notre ennemi, c’est que c’est pas notre ami.
- Je vous l’accorde. Et la paix c’est pour quand ?
- Dès que la guerre ne rapportera plus assez de thunes.
- Alors on n’est pas sortis de l’embrouille, c’est ça ?
- T’as tout compris man.
- Ok. C’était pour savoir.
- Pas de problème. Salut.
- Adieu.

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